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Grands Lacs: L’Envoyé spécial dit rester optimiste sur l’avenir de la région, en dépit des conflits persistants et des épidémies d’Ebola et de COVID-19

SC/14166

(Le résumé complet sera disponible ultérieurement.)

Devant les membres du Conseil de sécurité réunis virtuellement ce matin par visioconférence, l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs a confirmé que son optimisme demeure, au regard d’événements qui ont eu des effets positifs, et en dépit des conflits qui persistent dans une région en proie à la double épidémie d’Ebola et de COVID-19.

M. Huang Xia en a conclu qu’il faut redoubler d’efforts pour accompagner les États et les peuples de la région à surmonter cette double crise sanitaire et à consolider les progrès obtenus à ce jour dans la mise en œuvre de l’Accord-cadre.

Ci-dessous, les résumés des interventions faites par visioconférence dont les textes ont été transmis à la Section des communiqués de presse:

M. HUANG XIA, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo (RDC) et la région. Il a relevé que la pandémie de COVID-19 n’a pas épargné la région où le nombre de contaminations augmente, bien qu’à un rythme modéré en comparaison avec d’autres régions du monde. À ce jour, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a recensé 4 766 cas et 131 décès dans la région. Il a expliqué que les mesures telles que les restrictions de mouvements et la fermeture des frontières, sauf pour le fret, ont permis à ce stade de limiter la progression de la pandémie. En revanche, dans le domaine économique, les répercussions négatives de la crise sanitaire sont déjà importantes, avec l’arrêt quasi-complet de certaines activités dans des secteurs névralgiques comme le transport aérien, le tourisme, l’agriculture, les industries pétrolières et extractives. Selon l’Envoyé spécial, avec le temps, les mesures préventives prises à ce jour, ainsi que la réaffectation des ressources budgétaires pour faire face à cette pandémie, sont susceptibles d’affaiblir des économies déjà fragiles, avec des conséquences potentielles pour la paix, la sécurité et le développement de la région.

Pour M. Xia, bien qu’encourageantes, ces mesures doivent être renforcées. Et les pays de la région, dont certains se remettent de décennies de confits, auront besoin d’un appui déterminé et continu de la communauté internationale pour faire face durablement à la pandémie et pour en surmonter les conséquences. Il a salué à ce propos la décision du G20 d’accorder un moratoire jusqu’à la fin de l’année pour la dette, ce qui devrait soulager fortement les pays africains à faibles revenus. L’Envoyé spécial a relevé que la pandémie a obligé les pays de la région à réorienter leurs priorités, et ceci a eu un impact sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre, avec comme conséquence notamment le report de la deuxième Conférence sur l’investissement et le commerce dans la région des Grands Lacs, initialement prévue à Kigali, du 18 au 20 mars, ainsi que du dixième Sommet du Mécanisme régional de suivi, qui devait se tenir à Kinshasa du 27 au 29 mars. Malgré ces reports, il a dit continuer de travailler avec les pays signataires et les institutions garantes de l’Accord-cadre afin de maintenir toute l’attention nécessaire à l’organisation de ces deux événements, et de poursuivre les efforts dans la mise en œuvre de l’Accord-cadre.

À la suite de sa première déclaration devant le Conseil de sécurité en octobre 2019, l’Envoyé spécial a confirmé que son optimisme demeure, au regard d’événements qui ont eu des effets positifs sur la région. Parmi eux, il a cité les efforts pour asseoir la coalition gouvernementale en RDC, les progrès réalisés pour la normalisation des relations entre le Rwanda et l’Ouganda, la formation d’un Gouvernement d’unité nationale au Soudan du Sud, ainsi que les démarches diplomatiques de la RDC et de la Zambie pour régler leur différend frontalier. De même, des progrès ont été accomplis dans la lutte contre les groupes armés opérant dans l’est de la RDC. M. Xia a souligné que des efforts ont été faits pour accroître la coordination et l’échange d’informations entre la RDC, le Burundi, l’Ouganda et le Rwanda afin d’optimiser les opérations militaires contre les groupes armés. L’Envoyé spécial a demandé le soutien du Conseil de sécurité pour la création d’un groupe de contact et de coordination des pays de la région, en complément aux opérations militaires en cours.

Malgré les avancées, il a noté que des défis persistent, dont le plus grand demeure les activités des groupes armés, y compris l’exploitation illicite des ressources naturelles, ce qui compromet la confiance entre les pays de la région. L’insécurité qui en découle, particulièrement dans l’est de la RDC où les populations continuent de payer le prix fort, constitue une des causes principales de la crise humanitaire dans la région, a-t-il expliqué. Il a invité les groupes armés à cesser immédiatement leurs actes de violence et d’atrocités et à s’engager dans les divers programmes de désarmement, démobilisation, réintégration, et réinstallation ou rapatriement (DDRRR). Il a rappelé que les crimes commis par ces groupes armés ne resteront pas impunis. « Tôt ou tard, justice sera rendue », a-t-il promis. Il a également invité les gouvernements de la région à accorder toute l’attention nécessaire à l’appel lancé par le Secrétaire général de l’ONU en faveur d’un cessez-le-feu mondial. Pour l’Envoyé spécial, il faut rester attentif aux élections dans la région, car elles ont parfois été sources d’instabilité dans le passé. Il a dit souhaiter que les échéances à venir, notamment au Burundi et en République centrafricaine, soient l’occasion de consolider les acquis démocratiques et la stabilité dans ces deux pays. Il a encouragé tous les acteurs à garantir des processus électoraux pacifiques, inclusifs et crédibles.

En outre, M. Xia a noté que la région des Grands Lacs fait face aujourd’hui à des défis exacerbés par la pandémie de COVID-19 et la prolongation de l’épidémie d’Ebola. Il est donc question de redoubler d’efforts pour accompagner les États et les peuples de la région à surmonter cette double crise sanitaire et à consolider les progrès obtenus à ce jour dans la mise en œuvre de l’Accord-cadre. Selon lui, la lutte contre la pandémie pourrait être l’occasion de bâtir une plus grande solidarité et de renforcer la coopération régionale.

Dans les prochains mois, l’Envoyé spécial compte mener des actions prioritaires. La première est la mobilisation de la communauté internationale en faveur des pays de la région pour lutter contre la pandémie qui constitue un frein à la mise en œuvre de l’Accord-cadre et qui pourrait avoir des répercussions sur la paix et la sécurité dans la région. La deuxième priorité est de soutenir les processus de facilitation en cours et si possible, susciter de nouveaux engagements afin d’améliorer les relations entre les pays de la région, y compris en impliquant plus activement les femmes et les jeunes.

M. Xia entend également faire avancer la coopération sécuritaire régionale en privilégiant une approche holistique, avec des dispositifs militaires et non militaires, dans la lutte contre les groupes armés.

Une autre priorité est d’engager des consultations régionales et internationales sur l’exploitation et le commerce illicites des ressources naturelles. Enfin, l’Envoyé spécial entend poursuivre les consultations nécessaires à l’organisation du prochain Sommet du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre et à l’organisation de la Conférence sur l’investissement et le commerce dans la région des Grands Lacs.

La France s’est félicitée des développements positifs qui se sont produits au cours des six derniers mois dans la région. « Il est essentiel de continuer à tirer parti de l’élan encourageant qui a suivi l’élection du Président Tshisekedi en vue de réduire davantage les tensions, de renforcer la confiance et de progresser sur les autres fronts. » Elle a salué le rôle crucial joué par les Présidents Tshisekedi et Lourenço pour favoriser une dynamique prometteuse en vue d’une réconciliation entre le Rwanda et l’Ouganda.

Dans plusieurs domaines, la situation reste néanmoins préoccupante, a poursuivi la France, en mentionnant notamment la poursuite des violences dans l’est de la RDC ou bien encore la situation humanitaire. La délégation a exprimé la vigilance de la France à l’égard de la situation au Burundi. Étant donné le choix du Gouvernement burundais d’aller de l’avant sur la voie des élections dans le contexte actuel, il est crucial que les acteurs s’abstiennent de toute action qui pourrait compromettre la tenue d’élections pacifiques, inclusives et crédibles, a poursuivi la délégation.

Elle a ensuite partagé la préoccupation générale au sujet des menaces que la pandémie de COVID-19 fait peser sur la région, alors que le virus Ebola n’a toujours pas été éradiqué. Les pays de la région des Grands Lacs restent vulnérables aux pandémies à grande échelle, en raison notamment des déplacements humains importants induits par la persistance des activités de groupes hostiles. Ces pays ont également tiré les leçons des épidémies passées, a-t-elle poursuivi, ajoutant que la communauté mondiale pourrait bénéficier de leur expérience. La France a salué les mesures prises par les gouvernements nationaux pour lutter contre la propagation de l’épidémie conformément aux recommandations de l’OMS, rappelant qu’il est fondamental que leur mise en œuvre respecte les droits de l’homme. La France a mobilisé 1,2 milliard de dollars pour appuyer les efforts des pays africains contre la pandémie. Face aux conséquences socioéconomiques de celle-ci, la délégation a rappelé le plaidoyer du Président français pour un rééchelonnement de la dette publique des pays africains. « Nous saluons ainsi l’approbation par le G20 de notre proposition d’un moratoire sur cette dette. »

Enfin, la France a souligné, dans ce contexte de pandémie, l’importance cruciale de la coopération régionale, car c’est, selon elle, la seule manière de remédier aux causes profondes des conflits qui fragilisent la région des Grands Lacs.

Intervenant au nom des A3+1 (Tunisie, Afrique du Sud, Niger et Saint-Vincent-et-les Grenadines), la Tunisie a averti que les tendances positives qui peuvent marquer le début d’une nouvelle ère dans la région risquent d’être sapées par la COVID-19. La tâche immédiate est de consolider davantage ces avancées pour atténuer les risques potentiels de la pandémie, a-t-elle estimé. La délégation a relevé les évolutions positives dans une région qui, selon elle, est sur la voie d’une stabilité durable. Cette région, a-t-elle affirmé, doit être qualifiée non plus de « région marquée par les conflits » mais « de région placée sur la trajectoire du développement ». Appelant la communauté internationale à un appui à l’économie, elle l’a aussi appelée à fournir un appui rapide et concret aux gouvernements de la région pour qu’ils puissent contenir la propagation de la COVID-19 et assurer l’approvisionnement en biens essentiels. Il est donc essentiel de ne pas entraver l’acheminement de l’aide humanitaire et de mettre en place des mesures spéciales pour permettre un appui direct aux pays vulnérables à l’impact déstabilisateur du virus, a-t-elle dit.

L’Indonésie a noté qu’alors que l’épidémie d’Ebola semble arriver à sa fin, la région doit maintenant affronter le nouveau défi de la COVID-19. Saluant toutefois les progrès positifs dans la région, la délégation a souligné qu’il faut encore traiter des causes profondes du conflit. Elle a partagé l’inquiétude du Secrétaire général quant aux violations des droits de l’homme et aux efforts visant à saper les relations amicales entre les pays de la région. La paix et la stabilité restent fragiles: la menace des groupes armés, et l’exploitation et le commerce illicites des ressources naturelles nourrissent toujours l’instabilité. L’Indonésie a appelé les parties prenantes nationales, régionales et internationales à redoubler d’efforts pour mettre en œuvre leurs engagements au titre de l’Accord-cadre et à s’attaquer aux causes profondes des conflits pour permettre à la région de réaliser son « potentiel immense ».

La délégation a demandé au Conseil de sécurité de soutenir le travail des organisations régionales et des missions des Nations Unies dans la région. Elle a annoncé avec fierté que les Casques bleus indonésiens de la MONUSCO ont participé au processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), en s’engageant auprès des communautés locales, gagnant les cœurs et les esprits. Pendant la pandémie de COVID-19, a-t-elle estimé, l’aide humanitaire doit être prioritaire. Nous devons prêter assistance aux cinq millions de déplacés congolais, aux 330 000 réfugiés burundais et aux personnes vulnérables comme les femmes, les enfants et les personnes handicapées. Le partenariat avec la communauté internationale est absolument nécessaire. Pour sa part, l’Indonésie a promis de continuer sa coopération dans l’esprit qui est né en 1955 à Bandung maintenant que l’on célèbre le soixante-cinquième anniversaire de la Conférence Afrique-Asie.

Six ans après le lancement de l’Accord-cadre, les États-Unis ont dit rester optimistes quant à la faculté des pays des Grands Lacs de traiter, de manière constructive, des questions liées à l’insécurité, dont la lutte contre les flux illicites des biens qui contribuent à la corruption et la menace posée par les groupes armés. Notre confiance, se sont félicités les États-Unis, a été récompensée par l’élan positif qui caractérise la région depuis l’année dernière. Au moment où la communauté internationale riposte à la COVID-19, les États-Unis ont tenu à rappeler les « mesures extraordinaires », prises, il y a un an et demi, par les acteurs congolais et étrangers pour contenir la propagation d’Ebola dans l’est de la RDC. Ils ont réitéré l’importance de la transparence et de la nécessité de partager les données sur la santé publique avec les pays voisins et la communauté internationale.

Se tournant vers l’Envoyé spécial, ils l’ont exhorté à « innover », y compris à utiliser le système des visioconférences pour aider les gouvernements des pays des Grands Lacs qui doivent aujourd’hui trouver l’équilibre entre la lutte contre la pandémie et la satisfaction des besoins politiques, sécuritaires et économiques, « essentielle » à la paix régionale. La dynamique sera sans doute ralentie par la pandémie mais elle ne doit en aucun cas s’inverser, ont plaidé les États-Unis, en demandant à l’Envoyé spécial des informations plus régulières.

Ils ont souligné l’importance du suivi des résultats quadripartites entre le Rwanda et l’Ouganda. Ils ont aussi encouragé le Gouvernement du Burundi à tout faire pour que les citoyens puissent participer en toute sécurité aux élections prévues au mois de mai. En attendant, les États-Unis se sont dits préoccupés par les restrictions aux libertés d’expression, de réunion et d’association, lesquelles s’ajoutent aux informations sur les abus et violations des droits de l’homme. Notre message au Gouvernement burundais est clair, ont-ils martelé: des élections inclusives, pacifiques, transparentes et crédibles reflétant la volonté du peuple burundais sont essentielles pour satisfaire les revendications, améliorer la sécurité et booster la croissance économique. Les États-Unis ont assuré, en conclusion, qu’ils continueront à aider les pays des Grands Lacs à lutter contre la COVID-19, « pour préserver les gains enregistrés depuis la signature de l’Accord-cadre ».

(à suivre)

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